CONSEILS AUX
ETUDIANTS DE LA SAINTE SCIENCE
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Dans les précédents chapitres, nous
avons abordé les principaux problèmes que
rencontre le chercheur dans la réalisation des
premières parties de loeuvre.
Létudiant studieux pourra recueillir au
travers de ceux-ci les éléments qui lui
permettront de reconnaître le chemin. Mais nous
navons abordé que très succinctement
la phase essentielle et ultime. Cette phase, seul
Kamala-Jnana et quelques maîtres osèrent en
parler avec précision. Même Fulcanelli
refusa de parler clairement des dernières
opérations, en dehors de phrases trop concises
pour pouvoir être exploitées de façon
pratique.
Ces opérations sont pourtant dune
importance capitale pour la compréhension globale
de loeuvre et sa finalité. Aussi allons-nous
vous offrir des citations qui les précisent et qui
vous aideront à finaliser le but, le jour
où vous aurez réussi la parfaite
maîtrise des premières parties de
loeuvre.
Mais avant de transcrire ces textes, nous voudrions
vous parler des principaux écueils jetés
par tous les philosophes pour cacher non seulement
lentrée du chemin, mais le parcours
lui-même. A vaincre sans périls, on triomphe
sans gloire, argumentent bon nombre dauteurs. Mais
il est dautres raisons. Les opérations
alchimiques sont dune telle simplicité
quelles pourraient être traduites en
très peu de mots. Aussi est-il indispensable, afin
décarter les avides du chemin,
dutiliser des expressions et des paraboles que seul
peut décrypter létudiant studieux
doué dun esprit sain et logique, dune
imagination vive, dun coeur ardent et pur, celui
qui est disposé à travailler avec
persévérance, en méprisant les
vanités du monde, à servir les plus
déshérités, celui qui, enfin, est
capable de rester fidèle au silence imposé
par une longue tradition qui veut que seul le langage
symbolique soit utilisé pour transmettre la
connaissance acquise.
Le fait que les philosophes aient utilisé la
même dénomination pour désigner des
matières différentes, constitue le premier
écueil. Ainsi le mercure peut représenter
plusieurs matières, et il est lui-même
appelé soufre.
Une autre difficulté réside dans
lexpression des couleurs. Tout fils de science
sait, dès le début, reconnaître
lidentité de couleur que les philosophes ont
établie entre le noir et le bleu. En
général, quand il est parlé du bleu,
cest la couleur noire qui est exprimée. Mais
dautres couleurs ont aussi été
volontairement changées. Alors soyez prudents et
suivez le conseil dEtteila : « ne vous en
rapportez pas trop à la couleur ». Les
descriptions si claires, que les philosophes donnent
à leurs régimes auxquels ils attribuent des
colorations emblématiques, semblent dune
limpidité parfaite. Or nous avouons, avec
sincérité, que ces descriptions
colorées sont partiellement fausses ou
chimériques.
Il vous faudra aussi rechercher ce quentendent
les sages par le régime de la pierre. Kamala-Jnana
nous prévient quil existe un régime
alimentaire, un régime du feu et un régime
progressif et continu dans le sens opératoire. Le
chercheur aura donc grand intérêt à
savoir de quel régime il est parlé.
Fulcanelli nous prévient que la coction comprend
plusieurs répétitions dune même
manière dopérer et quil est
nécessaire, entre chacune delles, de
séparer les excréments, car notre pierre
pourrait en être infectée. Cest
là un conseil dune grande portée et
fort utile. « Celui qui connaîtra le
régime, écrit Philalèthe, sera
honoré des princes et des grands de la terre
».
Enfin, le raisonnement et la logique ne pourront vous
aider à découvrir le principal secret de
luvre alchimique. Ce secretum secretorum,
qualifié par Fulcanelli dabsurde, de
saugrenu et de paradoxal, parce que son action
défie toute règle scientifique, na
jamais été révélé et
ne le sera probablement jamais. Mais si vous ne refusez
pas les idées nouvelles et que vous cherchez parmi
les écrits et les paraboles dispensés par
les véritables philosophes, peut être
découvrirez-vous le grand secret et ferez-vous
partie des fils de la Sainte Science.
Le seul fait de vous prodiguer ces quelques conseils
et de vous énoncer ces écueils de la mer
hermétique vous permettra, nous en sommes
convaincus, de gagner beaucoup de temps, de
tâtonnements et de recherches inutiles. Mais gardez
patience, soyez tenace, persévérant et ne
méprisez pas le travail, de jour comme de nuit,
qui seul vous permettra de progresser.
Ecoutez maintenant les quelques descriptions qui
peuvent éclairer les dernières
opérations :
Kamala-Jnana, dans la genèse alchimique :
« A ce stade, les mondes sont des planètes
dont notre terre est le vivant modèle, ni trop
chaude, ni trop froide, elle permet la vie. Laction
rotative et perpétuelle de leur course dans
lespace continue à produire ce
cinquième feu, de qui naît chaleur,
lumière et énergie. Cependant, comme toute
chaleur activée dans un milieu sec produit la
couleur blanche, il sensuivit que certains mondes
éclaircirent et que leur blancheur produisit la
lumière. Les luminaires étaient nés.
Leur position céleste, leur degré de
siccité, leur incandescence, leur place dans
lorbite du système de lunivers furent
autant de signes de reconnaissance pour les hommes. Car
il est bien connu que létoile polaire que
voyaient les égyptiens dil y a trois ou
quatre mille ans nest pas la même que celle
que les égyptiens daujourdhui peuvent
voir. Lhomme peut donc situer les époques
daprès les luminaires. Les astres
incandescents sont nommés soleils, les astres
refroidis sont nommés lunes. Dautres encore
tiennent le milieu entre les deux et sont nommés
terres. Enfin, dautres encore sont appelés
étoiles ».
Le crédo alchimique par Mustagogos : « le
sage sait que de la mort vient la vie. Après le
stade de la purification ou mort, vient celui de la
résurrection ou vie. Les germes, enrobés de
leur gangue noirâtre et malodorante, le sceau
dHermès qui les protège étant
soigneusement mis de côté par
lartiste, subissent lépreuve du feu
purificateur sous forme de bains deau ignée,
sortent des ténèbres et deviennent
dune blancheur éclatante. La mort est
vaincue. Létoile du matin ou lune
très pure apparaît ».
« Continuant la cuisson, le sage voit se former
sur sa terre adamique renfermant le précieux germe
une sorte dhuile rougeâtre frangée
dor nommée parfois sceau
dHermès ou sang des martyrs, qui est la
quintessence du sel, du soufre et du mercure des
philosophes. Ce sang des martyrs est celui qui nourrira
lenfant devenu grand et permettra à la
pierre changée en lune de se revêtir de la
tunique rouge du Christ victorieux ».
« Nous voyons que la pierre parfaite issue de la
minière est bien aussi composée de la
même substance puisque le sage nourrit
lenfant naissant du lait virginal, ayant compris
quaucun corps étranger à la
minière ne doit être ajouté à
la granulation puis, plus tard, quand lenfant a
grandi, les colombes de Diane ayant apparu, il lui faut
une nourriture plus riche. Alors le sage, ayant
étudié les mystères de la nature,
lui donne une nourriture carnée qui est le propre
sang de la minière, extrait des trois corps la
composant et véritable ambroisie des dieux
».
« Pour la pierre des philosophes parvenue au
stade de lune très pure, très fixe, la
montée aux cieux alchimiques signifie que la
perfection est atteinte. En effet, le sage imbibe
doucement la pierre au blanc du précieux sang des
martyrs, renouvelant lopération et
bientôt la pierre revêt des teintes de plus
en plus chaudes, allant du jaune à
lorangé ardent, puis au rouge feu,
féerique chatoiement de couleurs vives, devant les
yeux fatigués et éblouis de lartiste.
La pierre est revêtue de la robe pourpre du Christ
victorieux. Le sage, devenu lélu du
Père et son confident, possède la pierre
philosophale ou pierre de la sagesse ».
Le livre de Synésius : « prenez, mon fils,
de la médecine blanche, autant que vous voudrez,
et la mettez dans un vaisseau, sur les cendres chaudes,
où vous la laisserez dessécher comme ces
cendres même. Donnez ensuite de leau du
soleil que vous aurez mise à part et que vous
aurez gardée pour cette opération.
Continuez alors le feu du deuxième degré
jusquà ce quelle devienne
sèche. Redonnez-lui encore de la même eau et
successivement imbibez et desséchez
jusquà rubification et se liquéfie
comme de la cire et courre ainsi que jai dit sur la
lamine enflammée. Alors cette matière sera
parfaite et rouge. Mais remarquez que toutes les fois que
vous imbiberez, vous ne devez pas mettre de leau
solaire plus quil nen faut pour couvrir le
corps et cela sobserve exactement, de peur que
lélixir ne se submerge et ne se noie. Vous
procéderez par ordre, jusquà la
perfection de la médecine, savoir
jusquà ce que la puissance de la digestion
du feu la convertisse en poudre très rouge qui est
la véritable huile des philosophes, la pierre
sanguinaire, le corail rouge, le rubis précieux,
le mercure rouge et la teinture rouge ».
La vie zodiacale de Moïse par Kamala-Jnana :
« Juste avant sa mort, Dieu montrera à
Moïse, de loin, la terre promise, pourquoi ? Parce
que la vraie pierre philosophale, ce nest pas lui
qui la foulera, mais Josué. Enfin, le deuil de
trente jours porté par Israël, alors
quaura débuté le cycle de
Josué, indique que le stade de la multiplication,
redébutant par la mort de la pierre, a une
durée de trente jours philosophiques. Les pleurs
indiquent aussi quon recommence par solve.
Soulignons simplement pour mémoire et pour preuve
que la vie publique de Josué (multiplication)
renferme également, en abrégé, les
principales phases de solve et coagula : carnage ou
putréfaction, retrait des eaux du Jourdain,
fixation de la lune et du soleil, etc... ».
Basile Valentin, quant à lui, sest
montré beaucoup plus discret sur les
opérations que nous ont si parfaitement
décrites les auteurs que nous venons de citer. Et
pourtant, ses explications ne sont pas sans profond
intérêt pour celui qui, déjà,
a su reconnaître ce que les sages entendent par
leur or et leur antimoine. Aussi citerons-nous une partie
de sa douzième clef qui se rattache à cette
partie de loeuvre que nous étudions
présentement :
« Sans le moindre détour, je livrerai
cette clef du progrès véritable et
très parfait de la teinture et, dans ce but, sois
attentif à ma doctrine afin que tu la suives.
Lorsque la médecine et la pierre de tous les sages
est faite et parfaitement préparée du vrai
lait de la vierge, prends en une partie, puis
dexcellent et très pur or, fondu,
purgé par lantimoine et réduit en
lamelles très minces, autant quil soit
possible, trois parties. Mets les ensemble dans un
creuset servant dordinaire à fondre les
métaux. Donne dabord un feu lent pendant
douze heures, après tiens en fusion,
continuellement, pendant trois jours et trois nuits. Dans
ce moment, lor purgé et la pierre ont
été faits pure médecine, de
propriété très subtile et
pénétrante. Car, sans le ferment de
lor, la pierre ne peut opérer ou montrer sa
force de teindre. En effet, elle est extrêmement
subtile et pénétrante. Mais si, avec son
ferment semblable, elle est fermentée et
conjointe, alors la teinture préparée a
reçu le pouvoir dentrer et
dopérer dans tous les autres corps. Prends
ensuite une partie du ferment préparé pour
mille parties du métal fondu que tu veuilles
teindre, alors sache, par vérité et foi
souveraines, que ce seul métal sera
transmué en bon or fixe ».
Nous avouons bien humblement quen nos
débuts nous avons travaillé sur
lantimoine et la stibine et nous savons que le
nombre de chercheurs qui ont commis cette confusion
regrettable et qui se sont laissé prendre au
traquenard grossier tendu par maints philosophes,
pourtant réputés, est simplement
prodigieux.
Artéphius qui commence par ces mots : «
lantimoine est des parties de Saturne... »,
Philalhète qui intitule lun de ses ouvrages
: « Expériences sur la préparation du
mercure philosophique par le régule
dantimoine martial... », et Basile Valentin
qui écrit tout un ouvrage sur le « Char
triomphal de lantimoine » ont, comme il est
dusage, parlé sous le voile du symbole.
Il nous a donc fallu, après des
expériences qui nous virent, hélas,
gâcher beaucoup de matériels, de temps et
dargent, reconnaître nos erreurs de jeunesse
et rechercher par ailleurs ce que ces sages voulaient
entendre par leur antimoine qui sert très
véritablement à purger leur or. «
Lantimoine des sages, matière
première extraite directement de la mine,
nest pas proprement minéral et moins encore
métallique, ainsi que lenseigne
Philalhète. Mais, sans participer de ces deux
substances, il tient le milieu entre lune et
lautre. Il nest pas néanmoins
corporel, puisque entièrement volatil. Il
nest point esprit, puisquil se
liquéfie dans le feu comme un métal.
Cest donc un chaos qui tient lieu de mère
à tous les métaux ». Et Fulcanelli, de
préciser : « Cest la fleur
métallique et minérale, la première
rose, noire en vérité, qui est
demeurée ici-bas comme une parcelle du chaos
élémentaire ».