Le tableau que nous étudions maintenant représente un champ de blé mur sous un ciel d’orage qui laisse percer le flux lumineux des rayons solaires et qui nous dit : « il rassemble pour répandre ». Les anciens désignaient souvent l’alchimie sous le nom d’agriculture céleste et beaucoup d’auteurs prennent leurs exemples ou leurs démonstrations sur les travaux champêtres. Aussi n’est-il pas étonnant que notre philosophe ait fait de même.

Tout l’art, nous dit-on, se résume à découvrir la semence, soufre ou noyau métallique, à la jeter dans une terre spécifique ou mercure, puis à soumettre ces éléments au feu, selon un régime de quatre températures croissantes qui constituent les quatre saisons de l’oeuvre. Le point délicat, le pivot de l’art, selon Philalhète, consiste à savoir extraire du métal ou du minéral la semence première et il ajoute « quiconque ignore le moyen de détruire les métaux, ignore aussi celui de les perfectionner ».

 

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Fulcanelli, de son côté, prévient les vrais disciples d’Hermès que toute graine capable de germer, de croître et de fructifier, réclame une terre attractive où elle puisse trouver les éléments appropriés à son espèce et à sa nature et il précise « c’est au règne minéral qu’il devra le demander ». Qu’ils s’appliquent aussi, nous dit-il, à purifier le mercure et à exalter ses facultés, à l’instar du paysan qui augmente la fécondité de l’humus en l’aérant fréquemment, en lui incorporant les produits organiques nécessaires.

D’autres philosophes parlent de leur « fumier ». Car, de même que celui-ci fournit à la terre les éléments nutritifs indispensables au développement et à l’accroissement des végétaux, de même le soufre et le mercure, dans notre agriculture céleste, ont eux aussi besoin de substances qui leur apporteront un secours efficace et joueront envers eux le rôle assuré par les engrais à l’égard des plantes.

Mais peut-être pourrions-nous aussi, en relation avec ce tableau, tout en restant au niveau de l’agriculture céleste, parler des trois acteurs minéraux du grand oeuvre : la terre, le sel et le soleil. La terre, c’est aussi notre matière première, la base et le fondement du labeur alchimique. Notre terre doit se joindre aux rayons du soleil afin que de leur union naissent les fruits représentés sur notre image par le champ de blés murs. Il faut produire une véritable génération au sein des matériaux philosophiques et il faut donc, de toute nécessité, l’aide de la nature et celle-ci nous serait refusée si, par malheur ou ignorance, nous ne la mettions en état d’appliquer ses lois. L’adepte Altus, en son livre muet, nous montre le firmament étoilé, nous rappelant ainsi la nuit propre à la génération et à la vie.

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